Franchir la ligne avec Hélène

Dans le premier entretien de cette série, Denis nous expliquait pourquoi, lui qui avait une « situation », avait fait le choix de partir. Il avait une place socialement valorisante, mais n’était pas heureux. Il avait eu le courage d’en tirer les conséquences. Voici, dans la même veine, le témoignage d’Hélène, documentariste, autrice et nomade.

La belle vie!
5 min ⋅ 29/11/2023

Franchir la ligne, oser dépasser les conventions ou le regard des autres pour aller vers ce qui nous fait du bien. Travailler autrement, ne pas se conformer à ce qui serait attendu de nous, ou ce que nous imaginons tel. Revendiquer une place à soi et le droit d’être heureux. Voilà le programme !

Merci à Isabelle pour la qualité de sa relecture.


Hélène, comment veux-tu te présenter ?

Je suis … moi. J’ai toujours eu du mal à me définir. 

Je suis une personne qui a besoin de découvertes régulières pour me sentir vivante. Et qui cherche à agir pour laisser plus de positif que de négatif lors de mon passage sur la planète bleue.

Comment qualifierais-tu le virage que tu as pris en devenant nomade ?

La vie en camion est venue sans que je la cherche. Elle m’est tombée dessus quand j’ai rencontré Benoît, qui cherchait un camion aménagé et qui commençait une série documentaire. On avait les mêmes valeurs, les mêmes envies, les mêmes projets. Travailler ensemble a tout de suite été une évidence. J’ai embarqué à bord de son camion et les choses ont suivi leur cours. 

Ce n’était pas un virage à proprement parler, parce que ce départ était la suite logique de mes expériences précédentes. Le voyage et la découverte ont toujours été mes moteurs depuis que je suis adolescente. Je le faisais en transport en commun. J’ai embarqué dans un véhicule. Le minimalisme lié au nomadisme ne m’a pas posé de problème puisque ce mode de fonctionnement a toujours correspondu à mon caractère.

Et depuis ? Quels sont les autres virages éventuels ?

Pourquoi as-tu modifié ta trajectoire ?

J’ai commencé la vie en camion aménagé en 2013. Forcément, entre 25 et 36 ans, j’imagine qu’on a tous des modifications de trajectoires ! J’ai commencé la vie en camion en couple. Puis, il y a eu la vie nomade seule. Puis la vie en camion, mais plus sédentaire, en changeant de collectif tous les 3 à 6 mois. Et récemment, la sédentarisation : être dans la même ville pendant plus d’un an. Cela correspond à un besoin actuel. Je doute fort de rester sédentaire très longtemps, mais, comme toujours, j’imagine la suite, mais je ne me projette pas : je verrai ce que la vie me propose et la manière dont je réagirai en temps voulu.

Comment s’est passée la transition vers la vie nomade ?

Le départ pour la vie nomade a été facile, parce que j’avais déjà passé les périodes compliquées en amont. Suite à un conflit important avec mon supérieur hiérarchique et mes collègues de travail, j’avais démissionné et pris la décision de me lancer en tant qu’indépendante. Cela faisait longtemps que je vivais avec le minimum (parce que je n’ai jamais eu beaucoup d’argent), je touchais le chômage et le projet lié au départ en camion était la création d’un projet qui devait, à terme, permettre de financer la vie quotidienne. Mes parents, mes ami.e.s avaient compris, grâce à mes expériences précédentes de voyage, que si j’avais décidé de partir, rien ne m’arrêterait. Iels savaient aussi que j’ai les pieds sur terre et que je ne prendrai pas de décisions inconsidérées.

Bref, les choix fondamentaux, dans mon parcours, cela n’a pas été de partir en camion, cela a été : 

  • de partir seule au Nicaragua avec un sac à dos quand j’avais 21 ans pour faire des reportages photo,

  • de limiter mes dépenses quotidiennes au minimum pour avoir plus de temps libre plutôt que de travailler beaucoup pour des choses qui n’étaient pas fondamentales dans mon quotidien,

  • de quitter mon travail salarié bien payé pour être en accord avec moi-même plutôt que de plier sous le poids des contraintes sociales.

Est-ce que cette phase de « diagnostic » a pris du temps ?

Fondamentalement, cette phase a pris des années dans la continuité de mon existence.

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La belle vie!

La belle vie!

Par Alexandra Borsari

Écrivaine de fiction et non-fiction. Militante pour un congé citoyen et la Skholè pour tous : avoir du temps pour soi, en particulier pour les activités culturelles, ne devrait pas être un luxe réservé à de rares élus. Nomade sur les routes d'avril 2017 à début 2023, je vis maintenant sur l'eau dans un petit voilier. Apprentissage de la navigation en cours pour repartir en itinérance, au moins une partie de l'année.

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